Ce petit article présente le mode opératoire que j’utilise pour entretenir les paliers à aiguilles des joints de Cardan sur les arbres de transmission. En effet, les joints d’étanchéité de ces paliers sont du genre coriaces : le graissage à la pompe sur véhicule ne permet pas de graisser les quatre paliers. J’ai tout essayé : graisseur pneumatique, à chaud, à froid...
Rien n’y a fait : un palier au moins n’était pas graissé correctement. Donc aux grands maux, les grands remèdes...
En pratique, cela équivaut à un remplacement complet des croisillons et de leurs paliers.
Bien que ce ne soit pas leur vocation première, les planches présentées illustrent certains points de la discussion proposée par Laurent à propos de l’équilibrage de ces mêmes arbres.
Comme toujours (!), je travaille à la presse. Cet outil permet de travailler avec douceur et précision ; il fournit surtout des indications précieuses sur l’importance des efforts exercés au démontage et au remontage. Il est possible de travailler avec des outils plus simples, notamment un étau, en s'inspirant de ce qui suit. En ce qui me concerne, je ne suis pas favorable au démontage et à la mise en place des pièces par chocs...
On commence par effectuer un nettoyage complet des pièces (solvant + air comprimé)
Ensuite, afin d’éviter de casser les becs des pinces à circlips, on exerce une légère poussée sur les circlips (la douille appuie directement sur le circlips). Si on a pris la précaution de positionner les circlips en butée (voir la fin du reportage) ils se débloquent sans effort.
La poussée à exercer est très faible (une petite centaine de kilos). Ma presse est une 15 tonnes.
Il suffit alors de retirer le circlips. Prendre la précaution, avant de le retirer, de bien le faire tourner dans sa gorge afin d’éliminer les traces de boue et d’oxydation.
État de la gorge après dépose du circlips.
Nouveau coup de soufflette pour sécher les traces de solvant ayant servi à nettoyer les gorges.
La photo suivante montre l’extraction de la cuvette. Je ne retire jamais les cuvettes en les chassant vers le centre du joint ; l’explication est la suivante :
certains montages (croisillons renforcés, par exemple) sont tellement justes qu’il est impossible, une fois la cuvette extraite, de retirer l’ensemble croisillon cuvette. On se retrouve alors dans l’impossibilité de retirer cet ensemble, ce qui impose de couper le croisillon ; vu la dureté des pièces, on est bien dans la m...
Donc je chasse systématiquement les cuvettes vers l’extérieur. Le diamètre de la douille supérieure est supérieur à celui de la cuvette. L’effort de la presse transite par les fourches.
La première fois, craignant des difficultés à l’extraction, j’avais fait un calcul pour déterminer l’effort de poussée max. admissible (effort au-delà duquel les pistes des cages à aiguilles auraient été endommagées). Je n’ai jamais atteint, et de très loin, cet effort critique...
Extraire la cuvette de cette manière assure également l’élimination des éventuels défauts pouvant subsister dans l’alésage des fourches.
Dans la mesure où l’intervention présentée a uniquement pour objet d’assurer un regraissage complet des paliers à aiguilles, je ne retire pas entièrement la cuvette.
Chasser les cuvettes requiert un effort très faible : l’aiguille du manomètre de la presse ne décolle d’ailleurs pas.
Ensuite, on passe au regraissage. Il suffit de repousser l’ensemble d’un côté puis de l’autre pour faire sortir la graisse.
Si la manip est bien faite, la graisse sort largement du palier.
Il suffit maintenant de remettre la cuvette en place. On reprend la même douille qu’au début, celle dont le diamètre est à peine inférieur à celui de la cuvette. On aperçoit une partie de la cuvette sous la douille. Il suffit ensuite de faire la manip sur tous les paliers et le regraissage complet est effectué...
La cuvette est enfoncée en butée (surtout ne pas forcer). Un dernier coup de soufflette, puis une goutte de Rustol dans la gorge pour protéger de la corrosion et faciliter la mise en place du circlips.
Voici le circlips en place
On le fait tourner dans sa gorge pour vérifier que rien ne gêne
Ici, ce n’était pas le cas : le circlips n’était pas complètement en place dans sa gorge : il ne tourne pas librement.
Il faut l’enfoncer encore à la presse.
Là encore, attention à l’effort exercé (risque de déformation de la fourche). Le manomètre permet de surveiller la manœuvre.
Dernière étape, la plus importante : placer la cuvette et le circlips en butée en exerçant un effort modéré repoussant les deux pièces vers l’extérieur comme si on voulait les extraire de nouveau.
Là encore, l’effort doit rester très faible (quelques kilos) pour ne pas marquer les pistes des cages à aiguilles. Je partage l'avis du Pater sur le risque d'endommagement des pistes, mais je me suis donné les moyens de gérer ce problème tout en parvenant à une mise en place parfaite des pièces.
Les douilles utilisées et le positionnement des organes d’extraction sont les mêmes que lorsqu’on chasse les cuvettes (voir ci-dessus). Si la manip est réussie, les circlips doivent être complètement coincés dans leur gorges : d’ailleurs, on casserait les becs des pinces à circlips si on essayait de les retirer ou même de les faire tourner...
On est ainsi absolument sûr que tous les organes sont à leur place, puisque ce sont les gorges des circlips qui assurent le centrage parfait des pièces. Et le fait de chasser les cuvettes pour mettre les circlips en butée libère le palier : autant celui-ci oscillait difficilement avant de repousser les cuvettes, autant son mouvement devient parfaitement onctueux et doux ensuite.
Les croisillons ne doivent présenter aucun jeu ni point dur.
Un petit coup de peinture achève le travail.