Gabrielle,
il est peut-être en vacances!
Ou l'ampleur de la polémique l'effraie, ce qui peut se comprendre...
Ce qui me gêne dans cette affaire c'est le débat sur le poids d'un véhicule, dont l'effet sur chaussée à très faible adhérence est qualifié de nul.
Les développements théoriques qui sous tendent ma position n'ont pas leur place ici ; je propose, pour éclairer la question, d'évoquer la chose sous un autre angle.
Nos véhicules de viabilité hivernale sont essentiellement dimensionnés pour respecter un temps de traitement (salage d'un linéaire de route) donné : de l'ordre de deux heures.
Il est donc inutile d'embarquer 30 tonnes de sel.
Avec les dosages de sel habituels et le poids mort des équipements (saumure, trémie, lame) compatibles avec les tonnages à épandre sur un circuit, la capacité de charge du porteur (PTAC) doit être de l'ordre de 19 tonnes. En pratique, un camion à un seul pont moteur (roues jumelées) suffit.
Il est également possible de choisir un 26 tonnes ; on tombe alors dans la gamme des 6x4 avec deux ponts moteurs, toujours en roues jumelées. Comme l'équipement de base reste à des clopinettes près le même, on a donc des véhicules qui pèsent sensiblement le même poids, mais dont la surface de contact au sol est accrue, dans le cas du 26 tonnes, de l'ordre de 65%.
On peut donc comparer les performances en progression sur chaussées à faible adhérence de deux poids lourds accusant chacun environ 20 tonnes sur la bascule :
motricité : un 6x4 pousse deux fois plus de neige
freinage : stabilité accrue, en particulier frein moteur.
aptitude à progresser en dévers (cas où il faut franchir deux poids lourds tankés côte à côte dans une rampe
en passant sur ce qui reste de la bande d'arrêt d'urgence) également accrue.
Le terme "d'accrue" est subjectif.
Évidemment.
Par ailleurs, tout est relatif ; on reste sur des terrains à faible adhérence, ce qui veut dire que le 6x4 se comporte évidemment pas comme sur route sèche. Mais essayez donc de convaincre nos gars que le 19 tonnes est kif kif même chose que le 26 tonnes sur une route de merde.
Vous m'en direz des nouvelles.
Mais je sais, nous ne sommes que des propres à rien...
On déduit de ce petit exemple que c'est la manière dont l'adhérence est sollicitée qui est déterminante et non les valeurs absolues de cette adhérence et du poids du véhicule. Les explications théoriques sont complexes, surtout quand on flirte avec des valeurs voisines de 0 : elles renvoient notamment au comportement des pneus en dérive et à la non linéarité de la relation reliant le poids porté par une roue et la force de guidage latéral qu'elle permet de mobiliser.
La plupart des véhicules ont des surfaces de contact au sol assez similaires, en tout cas pas suffisamment différentes pour que l'adhérence soit mobilisée elle aussi de manière sensiblement différente.
Donc plus ils seront lourds et plus leur demande d'adhérence sera importante. Et plus ils seront délicats à manier, car l'offre d'adhérence sera insuffisante.
Tout cela joue évidemment à la marge ; mais quand l'adhérence tombe à peanuts, la capacité qu'a un véhicule léger de grapiller des pouillèmes d'adhérence peut faire la différence.
Qu'on ne me dise pas qu'une 2 Cv équivaut à un Monospace sur le verglas : le Monospace sera au tas avant la Deuche, même si la Deuche va au tas dix mètres plus loin.
Vu de ma chapelle, l'enjeu est simple : le comportement sur chaussée glissante des gens conduisant des véhicules lourds (et tout particulièrement les 4x4) de surcroit bardés d'électronique (ce qui ne change rien, bien au contraire) est trop souvent inqualifiable, pour ne pas dire criminel.
Je ne pouvais donc pas laisser dire que la tenue de cap sur neige ou verglas est indépendante du poids, car c'est ce que beaucoup de ces gens pensent, malheureusement, ce qui ne les incite pas à la prudence la plus élémentaire.