Quelques commentaires sur toute cette matière...
Tout d'abord, au vu de l'état des cannelures des arbres de roues, je ne dirais pas que ce Land a travaillé dur. Si le TT costaud avait été son royaume, les portées sur les cannelures n'auraient pas cette gueule!
Ensuite, le fait d'avoir déphasé les arbres (au moins un) de transmission est une faute très grave qui a pour conséquence de contraindre fortement la transmission en générant en permanence des contraintes de torsion ondulée. Les vibrations viennent probablement de là, mais d'autres dégâts plus insidieux comme une fatigue générale des roulements et de la pignonnerie sont probablement à craindre.
Ça va avec le reste, diras-tu...
Et puisque cet engin a manifestement été entretenu par un ou plusieurs gougnafiers, une remarque sur l'état du différentiel central : les transferts de matière que tu as observés sur les appuis des satellites sont provoqués par un grippage.
Lequel est lié à l'intensité de l'effort plaquant les pièces et, surtout, au différentiel de vitesse entre les pièces en contact car c'est lui qui, généralement, casse le film d'huile.
Pour situer les idées, à une vitesse de croisière de 110 km/h, une différence de rayon sous charge de 15 mm entre les pneus avant et arrière induit une différence de vitesse relative de presque 5 km/h entre les essieux AV et AR. Non seulement on s'approche de la valeur qui affole tant les contrôleurs techniques et les possesseurs de 4x4 soucieux de préserver leur mécanique lors du passage au banc de freinage, mais ces conditions de fonctionnement « critiques » sont tranquillement appliquées des heures durant et pendant des dizaines de milliers de km.
Le passage au banc de freinage est donc un éclat de rire par rapport à ce qu'endurent de nombreux Land au quotidien...
Car ces 15 mm, on les atteint sans effort et surtout sans s'en rendre compte : il suffit de ne prêter aucune attention à l'état d'usure des pneumatiques ni à la pression des pneus.
Tu vas me dire que ton 4x4 circulait dans le 06 et que, dans ce département, les lignes droites sont rares et les autoroutes encore plus... Peut-être, mais qui sait réellement comment a été utilisé ce 4x4?
Et aussi, quelle était la charge des essieux et à quelles pressions leurs pneus étaient gonflés?
Tout ça pour dire qu'imputer cette avarie à des 4x4 qui font essentiellement du TT ou de la piste ne me paraît guère convaincant. Perso, pour avoir travaillé sur quelques différentiels centraux (mais pas — encore — sur un Land et j'espère bien, comme Pater, ne pas avoir à y mettre le nez de sitôt) j'ai l'intime conviction que c'est la route et la non prise en compte des différences de circonférence des roues qui flinguent les différentiels centraux. Car sinon, on observerait les mêmes désordres sur les différentiels d'essieux, dépourvus de rondelles antifriction qui, certes, sont soumis à des couples beaucoup plus élevés (entre 5 et 8 fois, ça dépend de l'usage et des rapports de ponts) mais
à des vitesses de rotation (locales et générales) des satellites beaucoup plus faibles...
Concernant le montage d'un Torsen en interponts, l'idée n'est pas mauvaise au regard des fonctionnalités de ces différentiels et de leur facilité d'emploi. Pour autant, pour avoir déjà évoqué cette question avec Escanogat, les Torsen sont des différentiels très efficaces mais eux aussi particulièrement sujets à l'usure, leur conception provoquant des pressions très élevées sur les engrenages générant une fatigue prématurée. Dans l'emploi considéré, le problème reste donc le même qu'avec un dif ouvert classique : les couples à passer sont plus faibles mais les différentiels de vitesse à encaisser sont plus élevés.
En clair, d'un point de vue longévité, cela pourrait revenir à troquer un cheval borgne contre un cheval aveugle...
C'est ce qui explique que leur emploi n'ait pas été généralisé pour les transmissions intégrales des véhicules de tourisme.
En d'autres termes, quid de leur tenue dans le temps, sachant qu'en pratique, ces différentiels sont plutôt utilisés en compétition, là où les performances priment sur la longévité.
Le projet d'Escanogat d'analyser leur tenue en conditions réelles est donc une très bonne nouvelle!
Concernant la réparation d'un différentiel dans l'état du tien, au vu des prix farfelus des pièces et de l'inutilité de récupérer le même montage débile, je procédai généralement par réusinage de la portée endommagée du boitier et interposition d'une ou de plusieurs rondelles bronze alvéolées compensant l'enlèvement de matière, taillées dans une variété de bronze qu'on utilisait dans les paliers utilisés pour les charnières des portes d'écluse (l'Inoxyda si mes souvenirs sont bons). Cela permettait de multiplier les surfaces en contact, à la manière d'un embrayage multidisques de moto et, partant, de réduire la friction et donc les risques de grippage.
Même au double du kilométrage de l'intervention, je n'ai jamais eu à réintervenir sur des différentiels ainsi traités (leur mort technique initiale intervenait généralement vers 130 000 km). Bon, à l'époque, j'étais basé à la Mecque de la pêche hauturière, ce qui signifiait que j'avais des génies de la mécanique — capables de réaliser des usinages insensés avec des machines d'un autre âge — sous la main ; du côté de Nuits, ce serait sans doute un peu plus compliqué, bien qu'avec les engins exotiques qu'on trouve dans le vignoble, les mécaniciens qui vont avec doivent bien se trouver...
Un dernier point, si tu acceptes de te livrer à quelques petites mesures : là encore, contrairement à ce qui se passe dans un différentiel d'essieu, la force centrifuge joue un rôle non négligeable dans l'usure d'un différentiel interpont.
Pourrais-tu me communiquer les trois données suivantes, histoire de recaler pour les Land les ordres de grandeurs que j'avais en tête :
- le poids d'un satellite ;
- le nombre de dents d'un satellite et celui d'un planétaire ;
- la distance séparant le centre de gravité de deux satellites en vis-à-vis.
Cette cote, en gros :
Bon courage pour la suite et merci de partager tes aventures avec nous!
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