Différentiel de pont : révision et réglage

Entretenir une boite de vitesse, installer un différentiel autoblocant...

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Moudj
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Message non lu par Moudj »

salut
en meme temps, le grippage des sattelites sur l axe est peu probable sachant que ca tourne tres peu
tres peu en virage
bien plus en TT
si l axe est bien centre, il n y a pas d efforts radiaux des sattelites sur l axe
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j.f
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Message non lu par j.f »

En voici un exemple :
Voir l'axe du haut. Celui du bas est juste un peu usé.


Image


Le démontage ne fut pas une mince affaire !
Un satellite tournait à peu près, l'autre était pratiquement soudé à l'axe.
Et le remplacement de l'axe non plus ! Le métal déposé dans l'alésage des satellites a été éliminé grâce à de la pâte à roder et un axe neuf. Près de deux heures avant que ça tourne correctement.

Ce genre de problème n'est pas rare.

TT bien sûr !
RRVM de 90 / Vive la bidouille ! Et pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?"Les RANGES ou les LANDS c'est comme les filles ,y a toujours un endroit ou t'appuie qui les font pleurer" (bobflappy, le 24 juin 2003 après JC)
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nicodisco
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Message non lu par nicodisco »

Ok ça roule comme ça car usage quasi exclusif en TT, route juste pour partir faire le c** :wink:
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Claude
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Message non lu par Claude »

Je suis surpris de ne pas trouver ici plus clairement exposée la méthode de réglage du jeu d'entredents et de la précharge des roulements de différentiel telle qu'elle est proposée par le manuel d'atelier du Disco :
- placer le carter de différentiel et les chapeaux de roulements en serrant partiellement les boulons
- mettre en place les écrous de réglages
- resserer l'écrou gauche (côté grande couronne) pour supprimer complètement le jeu d'entredents
- resserer l'écrou droit jusqu'à obtention d'un jeu d'entredents compris entre 0,10 et 0,17 mm sans modifier la position de l'écrou gauche
- mettre en place les doigts de blocage et serrer progressivement les boulons de chapeau à 90 Nm...
Ça me semble plus simple que ce qui est dit plus haut (même si le jeu est plus difficile à mesurer en raison de la précharge) mais quelque chose m'échappe peut-être...
Modifié en dernier par Claude le 02/11/2005 14:12, modifié 1 fois.
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Moudj
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Message non lu par Moudj »

c est reparti...

bizarre la methode
- resserer l'écrou gauche (côté grande couronne) pour suprimer complètement le jeu d'entredents
- resserer l'écrou droit jusqu'à obtention d'un jeu d'entredents compris entre 0,10 et 0,17 mm sans modifier la position de l'écrou gauche
si tu resserres a droite alors que tu as rattrape le jeu a gauche, tu n auras pas d entre dent mais une precharge des roulements de la noix
va falloir serrer salement pour gagner 1 a 2 dixiemes

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The Pater
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Message non lu par The Pater »

Claude,

La méthode que tu indiques est celle que j'ai aussi dans le manuel du Def n° LDAWNEN93 pour les diff de pont avant (90,110) et diff de pont arrière (90 uniquement).

Comme, j.f. travaille presque uniquement sur des RR et que je n'ai pas le manuel d'atelier RR et que j.f. est suceptible......


Bon, la méthode du manuel et que tu indiques me semble correcte, mais tu oublies de dire qu'il fait mettre le diff en vertical (axe en vertical) par éviter le déversement de la courronne sous le poids du diff.
Ne pas oublier non plus de faire tourner la couronne pour que les rouleaux des roulements se mettent en place, sinon le réglage est faux.

Autre petite précision, où cas où. Pour obtenir un jeu d'entredent de 0.10 à 0.17 mm, on de comprime pas le roulement de gauche de 0.10 à 0.17 mm car ce jeu est un jeu "presque" angulaire (dépend de l'angle de pression de la denture). Ce n'est pas un déplacement (éloignement) axial de la couronne par arpport au pinion, mais la rotation angulaire possible de la couronne sans que le pinion ne bouge.


Pour répondre à moudj,

Un roulement, même s'il est en acier se déforme sous charge. Imagine deux ressorts à la place des roulements.

Comme les deux roulements sont identiques, c'est comme avoir deux ressorts identiques.

Si tu comprimes l'un des ressorts, l'autre va se comprimer aussi, de la même valeure.

Donc serrer l'écrou droit, c'est comprimer le roulement droit...mais aussi comprimer le roulement gauche. Comme le roulement gauche se comprime, la couronne s'éloigne du pinion.

Tout en raisonnant "ressort" à la place des "roulements" tu verras que pour obtenir une compression du roulement gauche pour avoir l'entredent adéquate), il faut enfoncer l'écrou de droite du double de la valeure de compression du roulement de gauche.

Quand à la valeure réelle de précharge, il faudrait connaître la géométrie de la denture pour transformer la valeure donnée (arc de déplacement angulaire) en délacement axiale de la couronne.


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Message non lu par Moudj »

Autre petite précision, où cas où. Pour obtenir un jeu d'entredent de 0.10 à 0.17 mm, on de comprime pas le roulement de gauche de 0.10 à 0.17 mm car ce jeu est un jeu "presque" angulaire (dépend de l'angle de pression de la denture). Ce n'est pas un déplacement (éloignement) axial de la couronne par arpport au pinion, mais la rotation angulaire possible de la couronne sans que le pinion ne bouge.
autant pour moi...
tu a raison mais alors il faut deplacer la noix d une valeur superieur a l entre dent, ca me parait bcp comme charge sur les roulements
vais voir si j ai un diff assemble et mesurer la correlation "deplacement noix"/entre dent
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Claude
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Message non lu par Claude »

D'après mon expérience (récente) une faible compression est nécessaire pour obtenir un jeu significatif mais ce jeu est assez difficile à mesurer.
Cette compression est mathématiquement supérieure à l'entredents recherchée peut-être 20 à 30 % de plus soit 0.12 à 0.20 mm.
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Message non lu par Moudj »

D'après mon expérience (récente) une faible compression est nécessaire pour obtenir un jeu significatif mais ce jeu est assez difficile à mesurer.
Cette compression est mathématiquement supérieure à l'entredents recherchée peut-être 20 à 30 % de plus soit 0.12 à 0.20 mm.
ben, ca a l air plus que ca
(j ai essaye mais sans comparateur, juste des cales et c est la merde, j y arrive pas)
il semble que le deplacement de la noix soit deux fois superieur a l entre dent
donc 0.2 a 0.35
soit si je t ai bien compris pater: serrage de l ecrou de droite depuis le jeu nul (dans la methode pre cite): 0.4 a 0.70
ca me parait bcp...
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The Pater
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Message non lu par The Pater »

Moudj a écrit : ben, ca a l air plus que ca
(j ai essaye mais sans comparateur, juste des cales et c est la merde, j y arrive pas)
il semble que le deplacement de la noix soit deux fois superieur a l entre dent
donc 0.2 a 0.35
soit si je t ai bien compris pater: serrage de l ecrou de droite depuis le jeu nul (dans la methode pre cite): 0.4 a 0.70
ca me parait bcp...
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En effet, bien que je ne connaisse pas la géométrie de la denture, je pense que pour avoir un jeu d'entredent de 1 (unité sans importance) il faille comprimer le roulement en axial de bien plus.

Supposons un angle de pression de 20° (généralement utilisé), c'est une supposition.
tg20° = 0.364

Soit X le déplacement d'éloignement de la couronne et Y le demi jeu d'entredent. J'indique bien le demi jeu car quand tu recules la couronne, il y a du jeu de chaque coté des dents, la somme du jeu donne l'entredent.

X= Y/0.36 d'où 0.135 mm (milieu de 0.10 et 0.17 mm) d'entredent a nécessité (0.135/2)/0.36 = 0.1875 mm de compression du roulement coté couronne.

Donc l'écrou coté opposé couronne doit être enfoncé du double, soit 0.375 mm (valeure moyenne).

Calculs basés uniquement sur une supposition de géométrie de denture et suppose que je me soit pas planté !.

Les valeurs que tu as mesurées le sont avec la géomtrie réelle de denture que je ne connais pas, donc je ne ferai aucune remarque, si ce n'est qu'il faut (nous l'avons vu tous les deux avec des moyens différents), enfoncer l'écrou de serrage de bien plus que la valeur de l'entredent.



De telles valeures pour ces dimensions de roulements ne sont pas pour moi choquantes.
1) on ne demande pas plus de 10 000 heures de fonctionnement (600 000 km à 60km/h).
2) cela permet de réduire le déplacement de la couronne par rapport au pinion sous couple et donc un meilleur engrenement.


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Message non lu par Claude »

Je ne sais pas quel est le pas de l'écrou de réglage et je ne vais pas redémonter pour savoir (un nez de pont, c'est un peu lourd quand on est couché sous la voiture, surtout avec un TrueTrack dedans) mais si on estime 1 mm au tour, ça ferait entre un quart et un tiers de tour... j'ai dû mettre un peu moins par respect pour les roulements mais, en gros, ça se tient.
Modifié en dernier par Claude le 02/11/2005 14:08, modifié 1 fois.
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Message non lu par The Pater »

Bon j'ai fait quelques calculs avec une référence de roulement que j'ai trouvé en page 1 de ce sujet.

Enfoncer l'écrou de droite de 0.375 mm donne une charge proche de 4,7 tonnes sur chaque roulement. C'est sans compter la charge supplémentaire lors du fonctionnement du véhicule.
En prenant une vitesse du véhicule sur autoroute, la seule précharge donne une durée nominale de quelques heures.........

Bon il y a quelque chose qui ne vas pas :

1) As t-on bien compris la méthode ? je pense que oui.

2) Ai-je pris la bonne référence de roulement ? Qui peut dire quelle est la bonne référence de roulement pour le support de diff des ponts standard. J'avais pris des LM 501349/310/Q.
J'ai essayé avec un autre roulement de capacité proche mais avec un angle différent et la charge tombe de 4.7 à 3.7 tonnes, mais donne toujours une durée trop faible.

3) On n'a pas pris la bonne géométrie de denture. Quel est le véritable angle de pression ?

4) Mon calcul donnant la relation entre la variation d'entredent et l'éloignement de la couronne du pinion est faux ?

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Message non lu par The Pater »

Euh, aussi....

Dans mes hypothèses, le logement des roulements et le corps du diff est très très rigide et tout le déplacement de la couronne est repris par l'écrasement des rouleaux dans les roulements.
Pour être plus proche de la réalité, il faudrait mesurer la déformation (l'écartement) des deux logements des roulements et la compression axial du corps du diff.


J'ai refait le même calcul, avec les mêmes roulements, mais avec le Salisbury dont les logements de roulement sont bien plus rigides. la méthode donne une précharge de roulement de 0.127 mm à l'aide de câles. Donc 0.0635 mm par roulement.....et là on trouve des durées nominales bien plus en rapport avec ce que l'on devrait trouver !!!!
La charge sur les roulements tombe vers les 10 tonnes (sans charges dues à la transmission du couple).

Bien ici aussi, le corps du diff et les logement des roulements sont supposés non compressibles.

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Message non lu par Claude »

Pour moi, le jeu d'entredents représente bien l'espace minimum entre les dents des deux pinions et non le déplacement de la grande couronne entre deux contacts avec le pinion d'entraînement, ce qui supposerait de déterminer un rayon selon lequel faire la mesure.
On est donc dans des mesures qui sont du même ordre : 0.2 mm d'enfoncement du roulement pour obtenir 0.10 à 0.15 mm d'entredents soit 1/5ème de tours si on admet un pas d'un mm.
Je ne sais pas mesurer la contrainte sur le roulement mais ça se fait presque sans outil sur les écrous de réglage.
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Message non lu par The Pater »

Claude a écrit :Pour moi, le jeu d'entredents représente bien l'espace minimum entre les dents des deux pinions et non le déplacement de la grande couronne entre deux contacts avec le pinion d'entraînement, ce qui supposerait de déterminer un rayon selon lequel faire la mesure.
C'est pourtant le déplacement de la couronne qui est mesuré par LR, le doigt du comparateur sur une dent comme le montre j.f.

Mais tu as raison, plus on s'éloigne du centre, plus la valeur est grande.

Reste à voir si c'est possible de prendre le jeu avec des câles d'épaisseur entre deux dents dans ce montage.

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Normand 1400
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Message non lu par Normand 1400 »

Cet article complète celui que j’ai proposé sur Landmania et qui traitait du temps d’intervention nécessaire au réglage d’un pont.

Il se veut également compléter la doc constructeur et les échanges ci-dessus en offrant un point de vue un peu différent, tant en ce qui concerne les principes de base des différents montages que les détails qu’il me semble important d’avoir en tête pour ne pas se louper.

Je répète que je ne suis ni mécanicien ni théoricien de la mécanique. Au fil des problèmes que j’ai eu à résoudre, le scénario a souvent été le même : je me sers de ma jugeote pour analyser la situation, puis je passe à l’analyse théorique et à la métrologie (ce qui sous-entend des recherches documentaires parfois étendues) pour préciser certains points et enfin je mets en application. Comme je ne suis pas un adepte du véhicule Kleenex, je finis toujours par savoir si le boulot a été de bonne qualité...

J’ai donc pas mal de recul sur les interventions diverses et variées que j’ai pu faire sur des véhicules tout aussi divers mais qui, d’une manière générale, n’avaient pas une réputation de fiabilité exemplaire ; en outre, les transmissions (particulièrement celles des 4x4 qui sont très sollicitées) me passionnent : ceci explique sans doute cela.

Enfin, je précise qu’à l’époque du gros des mes interventions mécaniques, on ne parlait pas de photo numérique et autres ordinateurs personnels : je ne peux donc illustrer que partiellement mon propos avec des photos. Désolé.

J’ai réalisé celles qui suivent à l’occasion du montages de mes blocs, qui est une intervention plus simple que la “totale” que je vais décrire ; elle concernait un pont Rover type.

Pour clore ce préambule, car cette approche permet de prendre un peu de recul par rapport aux procédures constructeur (souvent lourdingues ou supposant un outillage hors de portée du mécanicien occasionnel et dont l’utilisation trop confiante peut aussi générer des erreurs), il me semble important de rappeler que les opérations de remontage et réglage complets d’un pont se voient assigner trois objectifs fondamentaux :
  1. positionner correctement le couple conique (avancée ou recul du pignon d’attaque ET positionnement transversal de la couronne). Les valeurs théoriques déterminées lors de la conception du mécanisme sont à corriger car il faut tenir compte des erreurs de taillage des pignons et d’usinage des carters et paliers,
  2. s’il s’agit d’un montage faisant appel à des roulements à rouleaux coniques, ce qui est le cas pour les ponts qui nous intéressent, il faut pré contraindre les roulements en exerçant une compression axiale permanente. La précontrainte peut être exprimée en centièmes de millimètres ou en N.m (Newton multipliés par des mètres, donc un couple). Le Pater a déjà écrit là-dessus, je n’y reviens donc pas. Des précontraintes de 5 à 25 centièmes sont courantes sur les montages qui nous intéressent. Exprimé en N.m, cela peut varier de 1,5 à 4,5. Généralement, pour ne pas dire systématiquement, cette valeur exclut le frottement exercé par le joint à lèvre. En outre, certains constructeurs (dont Land Rover) donnent plusieurs valeurs : pour roulements neufs ou rôdés. Je ne sais pas ce que la notion de “rôdé” recouvre. Honnêtement, je ne la sens pas bien (50 000 km, 150 000 km?). Je pense que le Pater a les idées plus claires que moi là-dessus.
  3. sécuriser le montage en immobilisant durablement les composants au moyen d’un important effort de compression qui les maintient en place. Cela concerne en particulier les bagues des roulements montées en coulissement gras (noter, pour l’exemple, que cette condition n’est pas remplie pour les moyeux d’où les quelques ennuis signalés dans le présent forum). Les couples de serrage sont de ce fait généralement élevés (de 100 à 250 N.m).
Pour être efficace, il y a souvent intérêt, et j’y reviendrai, à dissocier en cours d’intervention les manipulations dédiées à ces trois objectifs.

Même pour un constructeur donné, il existe un grand nombre de modes opératoires pour parvenir au résultat et un nombre tout aussi grand de combinaisons possibles des diverses opérations.

Les constructeurs préconisent généralement, pour gagner en productivité et fiabiliser les opérations paraît-il, l’utilisation de coffrets d’outillage accompagnés d’un inventaire à la Prévert des tâches à réaliser. Hormis des cas très particuliers (et encore) où la morphologie du pont rend très difficile l’intervention sans l’outillage constructeur (je pense notamment aux ponts Peugeot montés sur les Dangel dont le réglage est très difficile en raison d’un carter entièrement fermé) on arrive généralement à s’en sortir avec du bon sens, de la méthode et, il est vrai, un outillage polyvalent de base. Enfin, je tiens à préciser pour encourager ceux qui veulent se lancer que, de mon point de vue, les ponts de Land (Rover type) figurent parmi les plus simples qui soient à régler. Les Salisbury sont un peu plus délicats à opérer, notamment parce qu’il faut déformer le corps de pont “aux forceps” pour déposer et reposer le boîtier de différentiel. Mais ça se discute...

Enfin je précise, car je vais très certainement passer pour un allumé auprès de la majorité d’entre vous, que je travaille toujours avec une certaine précision : soit parce que j’interviens sur des véhicules à faible kilométrage pour les préparer, soit parce que j’interviens préventivement pour conserver un haut niveau de fiabilité. Il faut que la qualité de mon travail soit aussi bonne que possible : je ne fais donc généralement aucune impasse. Qui peut le plus, peut le moins...

Cela dit, j’en viens au sujet.


A-DEMONTAGE


Il est évident que les vérifications proposées ci-dessous ne sont valables que sur un pont encore à peu près en état, que l’on révise préventivement ou sur lequel on monte un autre type de différentiel. Si les roulements gueulent depuis plusieurs dizaines de milliers de kilomètres où qu’on découvre une belle salade de roues dentées (après un passage à gué qui a occasionné d’importantes entrées d’eau dans le pont par exemple) ou tout autre gâterie exotique, inutile de se prendre autant la tête...

Néanmoins, il m’est arrivé d’ouvrir des moteurs, des boîtes ou des ponts (généralement pas les miens car je suis du genre maniaque sur la conduite comme sur l’entretien, ce qui n’étonnera personne) en étant persuadé que tout allait être détruit dedans et d’avoir la surprise de ne constater que des dégâts mineurs, notamment sur les roulements. En fait, la mécanique est incroyablement résistante...

Comme quoi, rien n’est jamais perdu.

Donc, pour gagner du temps au remontage et aussi me faire une idée précise de l’état de l’organe avant révision, je ne démonte ni ne dérègle jamais un couple conique sans avoir préalablement procédé aux opérations suivantes :

1°) Vérification de la portée des dents (sans démontage).

Elle se réalise avec des traceurs du commerce. Faute de mieux, on peut faire ça au minium. La photo 1 montre ce que j’ai trouvé sur un de mes ponts alors que le véhicule avait à peine 40 000 km (c’était donc de la qualité usine, qui ne mérite que ce commentaire : peut mieux faire!). La portée de dents est nettement décalée vers l’extérieur de la couronne (portée au talon) ce qui révèle généralement un jeu d’entredent excessif.

Vérification faite au comparateur, le jeu d'entredent (dénommé aussi battement ou chute de dents) était de 23 centièmes, soit 6 centièmes hors tolérance. L’écart type était plutôt bon, avec moins de 2 centièmes, ce que confirmait la régularité des empruntes relevées sur toutes les dents (désolé, je n’ai pas de photo d’ensemble). C’est incontestablement un réglage du “lundi matin” mais indécelable à l’oreille vu le niveau sonore dans un Land, même si un excès de jeu rend en principe le pont bruyant au tirage (quand on passe du couple). Du point de vue résistance mécanique de l’engrenage, une telle portée fait travailler les dents dans de mauvaises conditions, les efforts de flexion étant appliqués vers le bord de la denture. En cas d’effort violent (reprise d’adhérence) la dent risque de casser plus facilement.

A l’inverse, si la portée avait été décalée vers le centre de la couronne, le jeu aurait été insuffisant (portée en pointe) et le pont aurait, en principe, été bruyant en tirage comme en retenue.

Pour illustrer le propos, la deuxième photo montre comment a évolué la portée après avoir remis le jeu dans les tolérances (la photo a été prise sous 17 centièmes de jeu).

Et la troisième, qui montre l’autre face de la dent parce que les empruntes sont plus faciles à analyser de ce côté, montre le résultat obtenu après réglage définitif (12 centièmes avec un écart type de 2 centièmes environ).

Image Image Image
En revanche, on peut dire que le pignon d’attaque est correctement réglé, l’empreinte étant à peu près centrée sur la hauteur des flancs de dents. Là encore, les erreurs sont assez facilement détectables : si la portée se fait vers l’arête de la dent, c’est que le pignon n’est pas assez avancé vers la couronne et le pont claque, si la portée se fait vers le fond de la dent c’est que le pignon est au contraire trop ressorti (le pont chauffe et fait du bruit).

Il est évident qu’un bon réglage du couple doit donner une emprunte parfaitement centrée sur les flancs de dents.

Par expérience, les erreurs de réglage sur les couples coniques à axes concourants deviennent visibles au traceur au delà d’une erreur de calage de 5 centièmes de millimètres (valeurs valables pour le jeu d’entredent et la distance conique). Il me semble que les ponts hypoïdes (Toyota par exemple) sont plus sensibles, mais il faudrait que je me remette dans les géométries de denture pour être vraiment catégorique. Noter que ces valeurs correspondent à l’incrément des cales de réglage (certains constructeurs soigneux proposent un incrément de 3 centièmes, mais c’est très rare).

2°) Repérage des zones où le jeu d’entredent est maximum.

Avant de déposer le boîtier de différentiel et la couronne, je trace des repères sur les deux pièces et je note les jeux d'entredent relevés aux mêmes endroits en faisant faire plusieurs tours au boîtier. Le but de la manip, surtout en cas d’écart type de jeu important, est de faire la part des choses entre la dispersion imputable au voile du différentiel et celle imputable aux irrégularités de taillage de la couronne et/ou du pignon. J’ai connu le cas une fois (pas sur un Land) : avec un voile du boîtier inférieur au centième, ce qui est excellent, j’avais un écart type de 8 centièmes impossible à réduire et qui faisait systématiquement sortir des tolérances. Après avoir tout essayé, je me suis résigné à changer le couple et tout est rentré dans l’ordre. Le pont avait du chauffer...

Ainsi il sera facile de repérer si le jeu d’entredent maxi coïncide ou non avec les valeurs maximales du voile qui seront, celles-là, relevées ultérieurement sur boîtier nu (il faut déposer la couronne comme le montre la photo 4). Il restera alors à compenser les écarts, ce qui limite les de tâtonnements au remontage. Je précise qu’il faut s’assurer de la bonne mise en place des roulements pour cette opération mais qu’il est inutile d’appliquer la précontrainte totale. J’y reviendrai par la suite.
Image


A ce stade, je commence généralement à avoir une idée assez précise de ce qu’il va falloir viser comme jeu d'entredent au remontage. Dans l’exemple des photos (pignon et couronne sont conservés), cela s’est traduit par un objectif de jeu le plus proche possible de la fourchette basse de la tolérance (ne pas oublier l’écart type). Il fallait en effet, et cela est dû au taillage même de ce couple de pignons, ramener la portée de dents vers le centre de la couronne, c’est à dire réduire le plus possible le jeu d'entredent.

3°) Évaluation de la précontrainte des roulements de différentiel.

Après avoir desserré les vis de fixation du chapeau de palier (celui qui sert à appliquer la précontraite au montage) et les avoir simplement resserrées avec les doigts, ce qui permet de libérer la bague extérieure du roulement concerné puis de desserrer sans dommage son écrou de réglage, je mesure de combien les chapeaux se rapprochent lorsque que je desserre entièrement l’écrou crénelé correspondant au chapeau desserré (cela n’est évidemment valable pour le Rover type). Je ne note plus les valeurs sur mon Land, mais il me semble qu’elles étaient de l’ordre de 20/25 centièmes, ce qui m’a semblé normal. Noter qu’il s’agit d’une simple curiosité d’enc... de mouches : j’aurais regardé la chose de bien plus près si j’avais connu, comme certains le rapportent, des problèmes récurrents de tenue du jeu d'entredent. D’où ma question dans ma première inter sur ce sujet sur Landmania car, en fait, j’avais en tête qu’un fluage des chapeaux (ou une déformation de l’ensemble du banjo due à un choc sur piste à grande vitesse) était peut être à invoquer : les conséquences auraient été des valeurs de précontrainte beaucoup trop faibles d’où jeu d'entredent non conforme et fatigue prématurée des roulements par défaut de précontrainte...

A ce stade, je vérifie également minutieusement l’état des chapeaux : en effet, dans au moins un cas sur trois, j’ai relevé des coups ou des rayures sur les faces usinées. Soit le chapeau a du tomber, soit le palier a pris un mauvais coup. Comme il s’agissait toujours de matériels “première main”, j’en déduis que ces petits défauts se sont produits en usine...

Les tolérances d’usinage étant très précises, ce type de problème génère des défauts géométriques préjudiciables à la tenue du mécanisme. Une méthode pour vérifier que le plan de contact chapeau/palier venu de fonderie sur le corps de pont est bonne : on éclaire d’un côté avec une baladeuse et on regarde de l’autre, en s’aidant d’un miroir si c’est nécessaire. Aucun rai de lumière ne doit filtrer... Avec un peu d’habitude, on parvient à détecter des défauts de l’ordre du centième.

En cas de problème, perception de la lime à épaissir...

La grosse boulette consiste évidemment à intervertir les pièces.

4°) Mesure du voile du boîtier.

Cette opération nécessite de déposer la couronne à la presse puis de remonter le boîtier seul (photo 5). Elle a pour but de repérer les zones de voile maximum et de croiser cette donnée avec la précédente pour préparer le remontage et le réglage.
Image


C’est à ce moment que je détermine s’il faut ou non décaler la position relative de la couronne et du boîtier : si le jeu d’entredent maxi ne coïncide pas avec le voile maxi du boîtier seul, il est probable que le voile ait déjà été compensé. Dans ce cas, on fera coïncider voile maxi boîtier avec voile mini repéré sur couronne avant démontage et on regarde ce que ça donne. Dans les autres cas, on peut essayer de décaler les pièces d’un demi tour pour voir si le voile et la tolérance ont changé. Dans le cas où l’écart entre les valeurs extrêmes est grand (5/6 centièmes me semble être un maximum) ou si l’on est toujours hors tolérance ou bout de deux essais, c’est qu’il y a un problème (corps étranger entre boîtier et couronne, déformation permanente de l’une ou l’autre de ces pièces).

Il est évidemment inutile de pré contraindre à les roulements à ce stade : en revanche, il faut s’assurer qu’ils soient bien en place en faisant faire au boîtier au moins 20 tours tout en vérifiant que les écrous crénelés restent bien serrés.

5°) Évaluation de la précontrainte avant dépose du pignon d’attaque.

Encore une idée farfelue diront certains.

Sans doute, mais j’ai néanmoins eu une mauvaise surprise sur mon pont avant (je rappelle qu’il était quasiment neuf lors de l’intervention) : sans rentrer dans de longues considérations (le Pater nous a promis un article dédié dont je prendrais connaissance avec attention le moment venu) la précontrainte des roulements à rouleaux coniques a notamment pour objet de maintenir une charge minimale sur les éléments roulants les moins chargés. La première conséquence de tout ça est qu’un examen visuel doit montrer que tous les rouleaux doivent tourner sur eux mêmes, en permanence et en tout point. Or j’ai constaté, en faisant tourner le pignon à la main (différentiel déposé) que les rouleaux ne tournaient plus lorsqu’ils atteignaient un secteur précis des pistes. Sous charge et vitesse normales, les éléments roulants connaissent donc d’importantes variations de vitesse circonférentielle (qui créent, par ripage lors de la remise en vitesse des rouleaux, des facettes sur les pistes) et de charge, qui vont fatiguer prématurément les éléments roulants et, par conséquent, limiter leur tenue dans le temps.

Donc :

soit il y a eu un problème de réglage de la précontrainte en usine, ce dont je doute un peu car le contrôle sommaire que j’ai réalisé spi en place (la mesure est bien sûr faussée car, à ce stade, je le répète, le pignon n’est pas encore déposé) me donnait des valeurs sensiblement supérieures à celles maxi données par le constructeur (ce qui est normal compte tenu du frottement dû au joint),

soit il y a un problème d’usinage : faux rond au logement de la bague extérieure, faux rond à la portée sur le pignon d’attaque, défaut d’usinage du roulement lui même (peu probable, Timken est une boîte sérieuse).

Comme je l’indiquais ci-dessus, je ne prends jamais la métrologie pour garantie absolue. Le flair et le feeling sont tout aussi importants...

Dans le cas que je présente ici, compte tenu du contexte particulier du montage des blocs, j’ai pourtant pris le parti de ne pas démonter le pignon d’attaque pour rechercher l’origine du défaut : j’ai estimé que l’affaire pouvait encore vivoter pendant au moins cent mille kilomètres (ce qui ne m’empêche pas de surveiller attentivement bruit et jeu du côté du pignon d’attaque). En fait, j’attends un peu pour pouvoir me faire une idée sur la tenue des Air Lockers sur laquelle je ne connais à vrai dire rien de précis et sur laquelle je n’ai encore rien lu de très satisfaisant. Car, en regardant leur morphologie (le boîtier est presque entièrement fermé pour des questions de résistance) je ne serai pas surpris de les voir se transformer en piège à limaille, donc d’être sujets à une usure excessive... J’ai donc programmé mon affaire pour les longues nuits d’hiver : à 150 000 km, je remets tout par terre et je révise entièrement le pont, cette fois, différentiel inclus. Et là, je verrai bien de quoi il retourne.

6°) Relevé de la distance conique (toujours avant démontage du pignon).

Je termine ainsi les opérations de démontage en relevant la distance conique. J’utilise le même protocole de mesure que celui décrit ci-après pour le remontage.

B-REMONTAGE

Au remontage, j’aborde les problèmes dans l’ordre suivant :

1°) Distance conique.

La distance conique est la distance séparant la face latérale du pignon d’attaque (celle sur laquelle on trouve la correction de taillage et le n° d’appariement) du point de rencontre des cônes primitifs (ceux qui génèrent la denture de la couronne et du pignon).

C’est évidemment par elle qu’il faut commencer, car elle influence l’entraxe des roulements du pignon d’attaque qui, à son tour, détermine l’intensité de la précontrainte.

Mon propos concerne plutôt les ponts Rover type. Mais cette partie de l’exposé est également valable pour les Salisbury puisqu’on ne remonte pas, à ce stade, l’entretoise déformable.

Noter que j’applique à la lettre, pour cette première partie, le protocole constructeur.

La première chose à faire est de mettre soigneusement en place les bagues fixes des roulements et la ou les cales de réglage de la distance conique trouvées au démontage. En ce qui me concerne, sur des mécanismes sollicités comme les ponts où les emmanchements sont serrés (sauf pour la bague intérieure du roulement arrière, celui situé sur l’arbre de commande du pignon, mais côté bride) je travaille uniquement à la presse et avec des montages adaptés. J’ai horreur des extractions ou mises en place au jet, fut-il en bronze, en cuivre ou en alu. Chacun fait ce qu’il veut (ou peut) mais il faut être conscient qu’avec ces outils de fortune, on ne maîtrise absolument rien en termes d’efforts appliqués et on risque toujours d’endommager les logements ou portées car les bagues ont la fâcheuse tendance à s’engager systématiquement de travers (sans parler du risque de déformer la bague du roulement elle même ou de taper à côté!). En l’espèce, j’applique un effort de 1,5 tonne environ en butée pour assurer la mise en place correcte des bagues extérieures des roulements arrière et avant (attention à bien soutenir le carter pour ne pas le déformer) alors que pour la bague intérieure du roulement avant, je vais jusqu’à environ 2 tonnes en butée, car l’effort d’emmanchement de cette bague est relativement élevé : il peut atteindre une tonne.

La deuxième chose à faire est d’assurer le placement correct des éléments roulants des deux roulements du pignon d’attaque pour que la mesure de la distance conique puisse s’effectuer dans de bonnes conditions.

Pour cela, on applique la précontrainte théorique à la paire de roulements coniques. Cette précision renvoie à ce que je disais en préambule sur les différents objectifs à atteindre lors d’un réglage. En substance, on ne s’intéresse à ce stade qu’à la seule précontrainte, car il n’est aucunement question pour l’instant d’appliquer le serrage DÉFINITIF, celui qui sécurisera le montage.

En effet, dans la mesure où les cales de précontrainte sont déposées, il faut bien voir que l’effort de compression obtenu en serrant l’écrou de la bride d’entraînement passe directement dans les roulements. Je n’ai plus les chiffres en tête, mais il semble me souvenir que le couple de serrage à appliquer pour obtenir le couple résistant préconisé pour les roulements est très faible (de l’ordre de 30 à 40 N.m maximum). Si on serre comme une bête, généralement en croyant bien faire, on marque les pistes des roulements qui ne vont pas atteindre leur durée de vie normale. C’est donc une erreur grave qu’il faut absolument éviter.

Il faut donc y aller très progressivement, en surveillant attentivement l’évolution du couple résistant des roulements, qui témoigne de leur mise sous contrainte...

Il faut aussi abondamment tourner le pignon d’attaque, pour que les roulements soient bien en place.

Le joint à lèvres n’est évidemment pas remonté non plus.

Perso, je serre l’écrou avec une clé dynamométrique à index (c’est une clé de merde mais ayant subi un étalonnage maison) et je vérifie la progression du couple résistant avec la bidouille décrite ci-dessous.

Je ne suis pas tout à fait d’accord sur le protocole de mesure du couple résistant des roulements exposé par JF. On doit relever, non pas le couple de décollement (celui qu’on observe lorsque le pignon commence juste à tourner) mais le couple lorsque l’arbre est déjà animé d’un mouvement uniforme. Ce détail a de l’importance car l’écart entre les deux valeurs est, si ma mémoire est bonne, d’au moins 30%. Je n’utilise donc pas le même type de montage que JF car celui-ci ne permet pas de mesurer simplement et précisément ce couple (il faudrait en effet que le peson reste perpendiculaire au levier pendant que celui-ci tourne avec la bride, ce qui est malaisé à réaliser) : je me bidouille, avec un morceau de contreplaqué en forme de disque collé à l’intérieur d’un tube PVC de 150 mm ou plus (ou moins, ça dépend de la plage de mesure du peson qu’on a sous la main), une vague poulie que je fixe sur la bride d’entraînement du pignon d’attaque. Sur le tuyau qui sert de jante de poulie, je fixe une ficelle. Et la ficelle est reliée à un peson. Il faut évidemment que les trous du contre plaqué soient correctement centrés pour que le zinzin tourne à peu près rond, sinon la mesure serait faussée.

Peu importe le diamètre de la poulie : il suffit de faire le calcul de l’effort de traction à exercer au peson pour obtenir le couple voulu (le couple recherché divisé par le rayon de la poulie donne la valeur de l’effort de traction à exercer). Noter qu’on a plus besoin de se casser la tête : l’effort appliqué par la ficelle est toujours perpendiculaire à l’arbre de commande du pignon (il n’y a qu’à tirer d’un mouvement régulier sur le peson) et on mesure de la sorte le couple de rotation en continu avec une grande précision (à la condition que la ficelle soit suffisamment longue pour pouvoir faire plusieurs tours).

Pour les sceptiques, je renvoie aux instructions relatives au réglage des roulements coniques du transfert, du boîtier de direction et autre montages précontraints : les explications sont sans ambiguïté...

Quand le couple résistant des roulements est atteint (généralement, je vise le milieu de la tolérance donnée par le constructeur) je note le couple de serrage de l’écrou. En effet, j’aurai besoin de cette valeur plus tard.

Cela fait, on peut enchaîner sur la mesure et le réglage de la distance conique proprement dite car les roulements sont en place.

Le constructeur, dans sa grande bonté, nous donne la distance conique théorique et la table de conversion des corrections de taillage (c’est rarement le cas).

Il nous donne même la valeur du calibre étalon (encore plus rare).

Lors de mes interventions sur des ponts analogues à celui présenté par JF (mes ponts actuels étant différents, je ferai en fin d’article un appel au peuple pour savoir si quelqu’un a la bonne doc) je me suis fait fabriquer un calibre. L’atelier qui me l’a fait n’avait qu’une consigne : viser à peu près une cote (39,50 mm dans le cas présent) mais me sortir un calibre dont les deux faces soient rigoureusement parallèles et m’en donner la dimension, après rectification, avec une précision atteignant au moins le centième (un coup de Palmer après rectif et basta). J’en ai été quitte pour donner la pièce au gars.

Il en aurait été évidemment autrement si j’avais exigé une cote de 39,50 à moins d’un centième près.

J’ai ainsi récupéré un calibre mesurant 39,678 mm (à 23°C si on continue le délire métrologique : si, si, on trouve encore des ateliers sérieux avec des gars qui jouent le jeu...).

J’ai un petit marbre (100x150 mm) et un comparateur à socle magnétique.

A partir de là, on peut travailler, mais en prenant quand même des précautions. En effet, l’état de surface de la face du pignon d’attaque servant de références aux mesures n’est pas bien terrible, ce qui d’ailleurs relativise la précision réelle des opérations (avant, on trouvait des faces rectifiées, même sur les 2 chevaux!). Dans ces conditions, il me semble en effet plus prudent, pour ne pas fausser la mesure, de ne pas déplacer le socle magnétique après l’avoir positionné sur le pignon d’attaque (la doc constructeur est muette là dessus, mais d’après les dessins, je suppose qu’il faut déplacer l’ensemble comparateur + socle quand on passe d’un palier à l’autre).

Ensuite, j’effectue l’étalonnage du comparateur sur le marbre et le calibre (idem protocole constructeur),
  • je le pose dans le carter en le collant sur le pignon (idem protocole constructeur)
  • je lis la cote du premier palier du différentiel (idem protocole),
  • je retire le comparateur de la tête du support sans dérégler le reste du support ni surtout le décoller du pignon (sauce maison). En fait, je libère le comparateur depuis sa fixation sur le bras du support sans rien dérégler d’autre,
  • je lis la cote sur le second palier (idem protocole),
  • je dépose le tout du pont (comparateur et support) puis je replace l’ensemble sur le marbre (le calibre étant toujours dessus) pour obtenir, par soustraction, la cote qui me manque (celle du second palier). Là encore, c’est de la sauce perso. Dans mon cas, je tiens évidemment compte, dans mes petits calculs, du fait que je travaille avec un calibre différent de celui prévu par le constructeur...
Je refais trois ou quatre fois l’ensemble de la manip pour vérifier que la répétabilité de la mesure est correcte. Encore de la sauce perso.

J’achève mes petits calculs en intégrant la correction de taillage (la doc constructeur donne tous les renseignements nécessaires) et je détermine l’épaisseur de cales la plus proche possible du résultat de mon calcul.

Important : si la distance conique que j’ai trouvée au démontage était déjà mauvaise (vérification au traceur + cote mesurée) ou si la répétabilité de ma mesure est mauvaise (plus de 5 centièmes d’écart entre deux mesures successives) ou si l’état de surface du pignon est franchement mauvais (attention aux bavures, inscriptions ou autres défauts) cela veut dire que la mesure de la distance conique est difficile, voire impossible. En effet, ces trois paramètres sont généralement liés et ont pour conséquence de rendre les mesures trop imprécises, donc fausses.

Dans ce cas, je prends une cale d’au moins deux classes d’épaisseur en dessous du résultat de mon calcul (tout en informant le fournisseur que je vais lui en reprendre une autre, si possible en lieu et place de la première) et je ne procède plus que par vérification au traceur.

Si la vérification est négative, j’augmente l’épaisseur de la cale, puis je recontrôle au traceur. Cela ne m’est arrivé qu’une fois ; pour en finir à peu de frais, j’ai sacrifié mon jeu de jauges d’épaisseur le plus merdique. Il suffit de découper 5 ou 6 bandelettes (à peu près aussi large que les vraies cales de réglage) de l’épaisseur voulue au Dremel, ou avec tout autre outil qui coupe le métal sans le déformer ni faire de bavure, et de coller -sans les superposer évidemment- ces bandelettes à la graisse sur les cales déjà sélectionnées en contrôlant évidemment l’épaisseur de l’empilement de cales au palmer (il faut bien sûr auparavant sortir, puis reposer la bague extérieure avec les nouvelles cales). On progresse ainsi avec le pas d’épaisseur qu’on veut (en général je colle aux classes d’épaisseurs constructeur) et on vérifie au traceur la progression du réglage...

Je précise que pour contrôler au traceur, il faut évidemment remonter la couronne et le boîtier de différentiel. Là encore, inutile de s’exciter sur la finesse du réglage de l’ensemble boîtier couronne : il faut néanmoins que chapeaux et roulements soient bien en place (une légère précontrainte est nécessaire pour s’assurer du placement correct des éléments roulants), le voile soit neutralisé et le jeu d'entredent à peu près en milieu de tolérance.

C’est un peu long si les dieux sont mal lunés ce jour là, car il faut recommencer TOUT ce qui vient d’être décrit ci-dessus tant que les traces sont incorrectes, mais c’est imparable...

Une fois le bon réglage trouvé, je monte la bonne cale.

En fait, il faut bien voir que ce montage “à blanc” évite de se retrouver en culotte courte en fin d’intervention alors que tout est remonté et serré aux valeurs définitives (je trouve en effet que JF a eu bien de la chance). L’expérience montre qu’on ne redémonte jamais rien quand une telle mésaventure arrive... Mais sur un mécanisme tel qu’un pont, “faire la taupe” avec les réglages peut avoir des conséquences fâcheuses.

2°) Précontrainte des roulements du pignon d’attaque.

Je passe ensuite au tandem tout aussi savoureux “réglage de la précontrainte des roulements du pignon d’attaque + application du couple de serrage définitif”.

Un petit commentaire perso sur la méthode Moudj.

Il s’agit en effet d’une astuce enseignée dans les écoles de mécanique dignes de ce nom. Mais on peut se faire facilement piéger par une méthode pourtant bien séduisante en apparence.

Il faut tenir compte de deux facteurs :
  • l’épaisseur de la cale à déterminer doit être en rapport avec les possibilités d’écrasement du fil d’étain (viser une épaisseur après écrasement d’environ quatre à six dixièmes me semble souhaitable)
  • l’alliage composant le fil de soudure flue énormément.
Le fluage est la propriété qu’ont la plupart des matériaux de continuer à se déformer “un certain temps” sous une charge constante et permanente. Pour les aciers utilisés dans les câbles de précontrainte des ponts en béton -précontraint bien sûr- on raisonne en milliers d’heures. Pour notre bout de fil de soudure, on compte en minutes...

J’ajoute, et cela va clore le quart d’heure encyclopédique, qu’un certain nombre des premiers ponts en béton précontraint se sont cassés la gueule parce qu’on n’avait pas tenu compte du fluage ; cela explique ma méfiance sur la technique miracle du fil d’étain...

Revenons à nos moutons.

Notre pignon d’attaque est en position, notre chère cale de réglage de la distance conique en place. On remonte le roulement arrière (celui côté bride) après avoir mis une partie des cales de réglage de la précontrainte (un peu de pif est donc nécessaire pour ne mettre, comme je l’ai dit tout à l’heure, ni trop, ni trop peu de cales) et notre précieux bout de fil d’étain. On serre l’écrou de bride au même couple que celui soigneusement relevé à l’étape précédente en faisant toujours généreusement tourner le pignon à la volée.

Pas plus, pas moins.

On fait une pause (clope, bière, au choix). Si, en revenant, on a la curiosité de mesurer le couple de serrage résiduel de l’écrou et la précontrainte, on va constater que les valeurs ont changé. Normal, le fil a flué.

On recommence et ce jusqu’à ce que l’écrou ne se serre plus quand on lui applique le couple de serrage noté lors de l’étape précédente (mettons 30 N.m, mais ce chiffre issu de ma mémoire défaillante est sans doute à moitié bidon) et on vérifie que la précontrainte est restée correcte.

La dernière fois que j’ai utilisé ce truc, le fluage a mis une bonne heure pour se produire...

Ce qui s’est passé : le fil a entièrement flué et son épaisseur résiduelle représente l’épaisseur de la cale à prévoir en théorie. Attention, la mesure du fil écrasé est parfois difficile...

Pourquoi en théorie? Parce qu’on n’a pas pris en compte les déformations qui vont intervenir quand le couple de serrage définitif va être appliqué. En effet, sous le serrage, le pignon d’attaque va s’allonger (il est soumis à un effort de traction) et l’ensemble cales + bague intérieure des roulements va se raccourcir (ils sont soumis à un effort de compression).

Sur des pignons d’attaque comportant une entretoise longue implantée entre les deux roulements et généralement assez mince, les déformations ne se compensent pas et la différence peut atteindre plusieurs centièmes (à des clopinettes près, elles sont proportionnelles au rapport des sections de l’entretoise et de l’arbre du pignon lui même) ce qui fausse -par excès- la précontrainte obtenue quand on serre au couple définitif. Sur le Land, pas de lézard, si mes calculs et vérifications sont exacts, la morphologie des pièces rend les déformations négligeables.

J’aurai l’occasion de revenir sur ce piège à cons classique qu’est la déformabilité des pièces en abordant le réglage du jeu d'entredent.

On a donc déterminé l’épaisseur de notre cale de précontrainte. A ce moment, on a le choix :
  • soit on achète une cale, si elle diffère de celle existante, et on passe directement aux vérifications,
  • soit on se fait une dernière petite mesure de recoupement, rien que pour le fun.
C’est évidemment ce que je fais.

Le principe est de réaliser un premier essai de serrage après avoir mis une cale dont l’épaisseur est inférieure d’une classe à celle qui vient d’être déterminée. On serre la bride au couple prescrit (mettons 135 N.m) et on mesure la précontrainte (poulie + peson). Et on recommence avec une cale de la classe immédiatement supérieure à la valeur calculée. Il est important de serrer au même couple (ici 135 N.m). Pour les ponts, je préfère les serrages “appuyés” (cela sécurise davantage l’assemblage) : je vise donc généralement la fourchette haute des couples indiqués par le constructeur.

Quand je fais cela, en général je fusille encore une ou deux jauges d’épaisseurs de l’infortuné jeu de cales que j’ai sacrifié à cette noble cause. C’est en effet la même technique que celle décrite ci-dessus pour la distance conique que j’utilise. Bestial, mais efficace.

Sur des écarts de précontrainte réduits comme ceux qu’on doit en principe obtenir avec cette manip, on peut estimer que la variation du couple résistant des roulements est à peu près proportionnelle au couple de serrage de l’écrou de bride.

Je suppose que le Pater va nous dégotter une courbe type de derrière les fagots montrant l’évolution du couple résistant développé par un roulement à rouleaux coniques en fonction de l’effort de compression axial qu’on lui applique ; cela me permettra de vérifier si mes petits calculs et suppositions sont justes....

A présent il suffit, pour conclure, de faire un calcul basique.

Exemple (valeurs totalement bidons) :
  • avec une épaisseur de cales de 4,18 mm, on obtient une précontrainte de 3,8 N.m
  • avec une épaisseur de cales de 4,28 mm, on obtient une précontrainte de 2,3 N.m
  • dans les deux cas, l’écrou de bride reste serré à 135 N.m.
Si je veux être pile poil au milieu de la fourchette de précontrainte (soit 3 N.m) toujours en maintenant la bride serrée à 135 N.m, il me faut donc une épaisseur de cales de 4,23 mm.

Si on a bien travaillé précédemment, on doit retrouver à des pouillièmes près la valeur de la cale déterminée par la méthode du fil d’étain. Dans le cas contraire, c’est le résultat de la dernière manip (celle avec les petits bouts de jauges d’épaisseur) qu’il faut prendre en compte.

Le réglage du pignon (distance conique et précontrainte) est à présent terminé en on sait que c’est bon : donc on remonte le tout dans le carter (sans oublier le joint à lèvres) et on serre au couple. Noter qu’on ne peut plus rien vérifier à ce stade, ce qui n’a aucune importance puisque la vérification a déjà eu lieu : le joint à lèvre crée un couple résistant supplémentaire qui s’ajoute à celui développé par les roulements.

Pour conclure cette partie, juste un mot sur les montages faisant appel à des entretoises déformables.

Si le principe de base est toujours d’obtenir une précontrainte en faisant varier l’entraxe des bagues intérieures des roulements jusqu’à faire apparaître un effort de compression, il est faux de croire que cette entretoise fonctionne comme un ressort qui se comprime avec l’effet du serrage jusqu’à ce que le bon entraxe soit obtenu, ce qui voudrait dire qu’elle est réutilisable.

Certes, ses caractéristiques sont telles qu’elle se raccourcit jusqu’à prendre la bonne longueur sous l’effort de compression généré par le bon couple de serrage de l’écrou de bride. En théorie, on pourrait obtenir l’effet recherché en restant dans le domaine élastique de l’acier constituant l’entretoise. Or on vient de voir (Cf. pont Rover type) que cette longueur doit être ajustée à quelques centièmes près et ce en dépit de tolérances d’usinage des carters, de l’arbre de commande et des roulements eux mêmes (Cf. inter du Pater) pouvant atteindre plusieurs dixièmes.

Pour résoudre ce problème, il n’y a qu’une solution : faire travailler l’entretoise au-delà de sa limite élastique. En effet, au delà de cette limite, l’acier se plastifie (s’écrouit) : cela veut dire qu'à partir de là, une augmentation très faible de l’effort de compression va entraîner une déformation beaucoup plus importante de notre entretoise (les diagrammes contraintes/déformations des aciers de nuance douce se “couchent” à partir de ce point). Cet “écoulement plastique” de l’acier va permettre de gommer les dixièmes d’écart dans les tolérances qui nous posent problème.

En contrepartie, l’entretoise n’est utilisable qu’une fois. Faites l’essai : comparez la longueur d’une entretoise utilisée et d’une entretoise neuve.

Bon, c’est vrai qu’il y a un moyen de repartir (provisoirement) avec une entretoise usagée si on a vraiment pas le choix, mais cet article se veut plutôt clean, donc...

Avec ce montage, même si la précision est un peu moins bonne qu’avec le réglage par cales, on fait d’une pierre deux coups : on règle la précontrainte tout en obtenant un couple de serrage élevé à l’écrou de bride.

3°) Remontage de l’ensemble boîtier-couronne.

J’ai déjà évoqué la question de la compensation du voile. en effet, il vaut mieux tâtonner le moins possible, sinon on est bon pour redéposer et reposer un certain nombre de fois la couronne, opération d’ailleurs pas très pratique sans presse. Attention aussi aux corps étrangers qui peuvent se glisser entre couronne et boîtier...

Sur les différentiels de série, qui sont en un seul morceau, en fait ça va plutôt bien. Sur les Airlockers, qui comportent trois parties, c’est plus difficile car les erreurs d’usinage ne se compensent pas forcément. Mais là n’est pas la question.

Je vous propose maintenant de laisser un peu de côté les protocoles constructeurs, toujours un peu lourds à digérer pour les non initiés, pour présenter les choses un peu différemment. Tant qu’à faire, essayons en même temps d’illustrer les différences fondamentales entre les modalités de réglage des ponts Rover type et les Salisbury.

Pour ce faire, imaginez deux boîtes en bois (genre caisse de pinard ou boîte à chaussures) sans fond ni couvercle.

Dans chaque boîte, il y a un morceau de bois, genre tasseau. Ce tasseau est un peu moins long que la boîte qui le contient.

Le tasseau représente évidemment le différentiel et la boîte représente le corps de pont pour le Salisbury et le nez de pont pour le Rover type.

Sur chaque petit côté de l’une de ces boîtes, il y a une vis traversante, genre vis de pressoir, dont le filetage est taillé dans la paroi même de la boîte. Sur l’autre boîte, il n’y a rien.

Le but du jeu est de centrer parfaitement le tasseau dans sa boîte et de lui appliquer, dans la direction de sa plus grande longueur, un effort de compression. La boîte reprendra aussi cet effort, qui tendra évidemment à la faire gonfler.

Commençons par la boîte aux vis de pressoir. Il semble logique de dévisser complètement chaque vis, de plaquer à la main le tasseau contre un des petits cotés de sa boîte, puis de le ramener doucement à la bonne place en ne vissant une seule vis. Une fois cela fait, après avoir ramené la seconde vis en appui aussi faible que possible (léchage) sur le tasseau, on visse fermement chaque vis d’une quantité égale pour comprimer le tasseau, qui va ainsi rester parfaitement centré par rapport à la boîte. Ok?

On vient de voir le principe de base du réglage d’un Rover type.

Pour la boîte sans vis, c’est plus chaud : là encore, il semble logique de commencer par plaquer à la main le tasseau d’un côté. Ensuite, on mesure l’espace libre qui reste entre le bout du tasseau et la paroi de la boîte. Et on rajoute un poil de cul à la valeur trouvée : de la sorte, l’ensemble tasseau + espace libre + poil de cul est plus long que la boîte. Le tasseau sera donc comprimé dans sa boîte. Si on divise par deux le total espace libre + poil de cul et qu’on répartit la valeur trouvée de chaque côté du tasseau après l’avoir convertie en deux paquets de cales d’égale épaisseur disposés de chaque côté on aura, là encore, mis le tasseau pile au milieu et on l’aura comprimé.

Le hic, c’est qu’il faut d’abord rentrer le tout dans la boîte.

Si on écarte la boîte aux forceps, ça doit rentrer... Si on s’énerve trop sur les forceps, on éclate la ... boîte (un peu gore, mon affaire). Ok?

Ça, c’était pour le Salisbury.

Et le jeu d'entredent?

Pas compliqué : en règle générale, un déplacement latéral de la couronne de 10 centièmes entraîne une variation de la chute de dents de 7 centièmes. Il suffit donc de faire une règle de trois pour déterminer de combien on doit déplacer latéralement le tasseau (donc le boîtier de différentiel) pour obtenir le bon jeu d'entredent.

La cuisine nécessaire est réalisée en conception ; il faut ensuite convertir le tout en baratin le moins ambigu possible pour limiter les erreurs d’interprétation (en instructions élémentaires séquencées comme disent les chébrans) et imaginer un coffret d’outillage le plus élitiste possible (c’est à dire aussi cher à se procurer que complexe à reproduire) pour que n’importe quel gogo disposant desdits matos et baratin puisse faire le boulot.

Toutefois les British, dans leur grande sagesse -et c’est surtout vrai pour le Rover type- ont pensé au réparateur de brousse : ils ont réussi à combiner en une seule et même opération simple l’atteinte des objectifs “réglage du jeu d'entredent” et “positionnement de la couronne”. Comme le dit JF, un petit Tic-Tac et le tour peut être joué avec un minimum de précision, sans matos, au feeling. C’est toutefois moins évident avec le Salisbury. Mais, patron, on peut quand même faire face avec un outillage de base non affecté à un type de véhicule... De plus, le Salisbury, avec son différentiel à 4 satellites, a la peau dure... Donc on doit moins souvent y toucher.

Messieurs les Anglais, recevez notre reconnaissance éternelle pour avoir de la sorte pensé au landiste de base, éternel amoureux transi de sa danseuse haute sur pattes.

On est bien tous d’accords là dessus.

Toutefois, vous allez me dire que mon histoire de boîte à godasses ne ressemble pas exactement à ce que décrivent les protocole constructeur pour les deux types de ponts.

Comme disait Coluche : y’en a onze qui suivent. J’ai les noms...

Je reprends mes exemples :

D’abord le Rover type.

Imaginons qu’après avoir tracé une repère sur le milieu du tasseau et le milieu de la boîte, on aligne ces deux repères en ne jouant que sur une seule vis. On recommence donc la même manip que ci-dessus.

Ensuite, si au lieu de comprimer le tasseau en vissant d’une égale quantité chaque vis, on n’en visse qu’une (on ne touche donc plus à celle qui a servi à aligner les repères et on utilise l’autre) que va-t-il se passer?

Le tasseau va, comme ci-dessus, se raccourcir et la boîte se dilater ; l’un est à présent plus court et l’autre plus long. Mais cette fois, le tasseau s’est déplacé latéralement par rapport à la boîte parce qu’on n’a joué que sur une seule vis pour comprimer le tasseau. Nos deux repères ne sont donc plus alignés. Si on transpose au pont Rover type, on en déduit que la couronne s’est déplacée latéralement par rapport au nez de pont. Qui dit déplacement latéral de la couronne dit variation du jeu de denture à hauteur de 70% environ dudit déplacement.

Le tour est joué : précontrainte et jeu d'entredent sont réglés en une seule et unique opération. C’est suffisamment rare et élégant pour être signalé : mention spéciale à Solihull.

Encore une chose pour être complet ; vous aurez remarqué que le désalignement des deux repères est imputable à deux phénomènes. D’une part à l’allongement de la boîte (ovalisation du nez de pont et déformation des chapeaux) et, d’autre part, au raccourcissement du tasseau (le boîtier de différentiel s’est également raccourci).

Visser les écrous de réglage tend bien à faire éclater le nez de pont et à écraser le différentiel.

Les modules de déformation de ces deux organes jouent donc un rôle fondamental dans le processus de réglage. Un module de déformation est le terme constant qui relie l’effort appliqué à un objet (traction ou compression) et la variation dimensionnelle (raccourcissement ou allongement) dudit objet. En fait, c’est la même chose que pour un ressort, à part que là, il faut un comparateur pour voir ce qui se passe.

Par conséquent, quand on remplace le différentiel d’origine à deux satellites et au décolleté généreux par un bestiau à 4 satellites genre Maxidrive, Airlocker et autre bloc d’acier à la silhouette de Rambo, il convient de se poser la question de la différence de module entre le différentiel d’origine et le différentiel de substitution.
Image


Si le nouveau dif devait s’avérer être nettement plus rigide que l’ancien, on courrait en effet le risque de sortir du domaine de validité du protocole constructeur ce qui, en l’espèce, aboutirait à appliquer aux roulements un effort de précontrainte beaucoup plus important que nécessaire tout en ayant pourtant respecté les jeux préconisés.

Pour ne pas alourdir encore un texte déjà très long, je ne vais pas poursuivre davantage l’analyse de cette question ô combien passionnante, mais qui relève cette fois de la préparation d’un engin et non du simple entretien.

Pour le Salisbury, il suffit de déplacer une égale épaisseur de cales (prélevées dans chaque paquet de cales initial) d’un côté à l’autre pour assurer le déplacement latéral donnant le jeu d'entredent recherché tout en assurant la précontrainte. Remarquez qu’en pratique, le petit calcul arithmétique préconisé par le constructeur, fondé sur la prise en compte de la position du différentiel quand pignon et couronne engrènent sans jeu, permet de déterminer directement la répartition des cales de chaque côté du différentiel, tout en assurant une chute de dents et une précontrainte correctes.

Pour finir, encore deux menus détails qu’il me semble important d’aborder en complément du topo de JF (l’exemple concerne le pont Rover type).

Le premier concerne les chapeaux de paliers. Comme l’indique le constructeur, il faut simplement remonter leurs vis de fixation et les serrer à la main pour procéder au réglage.

Pour comprendre pourquoi, faites l’expérience suivante : après avoir mis la bague extérieure du roulement et l’écrou en place (attention à avoir bien positionné les filets de l’écrou et du palier sinon on foire le filetage) visser simplement à la main. L’écrou se visse sans effort et la bague avance avec lui.

A présent, serrez au couple (90 N.m). Tout est bloqué, sauf à manœuvrer l’écrou de réglage avec une clé à ergots munie d’une rallonge. Et encore. Normal, le palier s’est légèrement ovalisé sous l’effet de la compression due au serrage. En examinant la piste extérieure du roulement, on constate d’ailleurs une répartition bien spécifique des empruntes, reflet de l’ovalisation. En principe, mais il s’agit sans doute d’une remarque de puriste, l’effet du confinement spécifique à ce type de palier doit être pris en compte dans le calcul de la précontrainte.

De même, pour avoir contrôlé, pour vérifier des calculs maison, la déformabilité d’un nez de pont du même type que le Rover type sous un effort d’expansion contrôlé, j’ai pu vérifier que la loi de déformation latérale des chapeaux de paliers est légèrement différente selon que les vis sont serrées au couple ou non. La cause est imputable aux efforts de flexion qui apparaissent dans la vis quand elle n’est pratiquement pas serrée. Au serrage, la vis se redresse et l’assemblage se rigidifie. Il s’agit aussi d’une autre application du principe de la précontrainte.

Pour illustrer, prenons un exemple simple : une pile de bouquins. Poussez sur le dernier, celui situé en haut de la pile. Il va se déplacer et, surtout, si elle est haute, la pile va commencer à pencher. Posez en haut de la pile une bonne vieille gueuse en fonte de 50 kg. Il faudra pousser nettement plus fort pour que la pile penche...

C’est donc pour cela que le constructeur préconise :
  1. de faire les réglages en ayant approché le serrage des vis à la main
  2. de vérifier après serrage au couple que la chute de dents est restée dans les tolérances. En général, elle varie légèrement (elle doit augmenter d’un ou deux centièmes).
Ne pas respecter cela, s’est s’exposer à des ennuis.

Autre point : j’ai parlé d’écart type. Tous ceux qui lisent ces lignes ayant des ordinateurs, donc des tableurs dotés de cette fonction, l’aspect mathématique de la question n’a guère d’intérêt. En revanche, le recueil des données est plus intéressant.

Parmi les règles de base applicables à la conception des engrenages, il en est une à connaître : le nombre de dents du pignon menant n’est jamais multiple de celui du pignon mené. Dans le cas de nos rapports de ponts, il en résulte que deux mêmes dents ne seront de nouveau en contact que tous les 50 tours de couronne. Cela a pour intérêt de répartir l’usure. Je fais donc une dernière série de mesure sur 50 tours de couronne pour déterminer la qualité du réglage final. L’échantillonnage statistique étant devenu suffisant, la notion d’écart type prend un sens mathématique.

En revanche, le temps que je mets pour réaliser ce bouquet de contrôle final étant généralement supérieur au délai de début de polymérisation des freins de filet dignes de ce nom, je ne prends pas le risque de monter les vis de palier au frein de filet pour devoir les rédéposer en cas de problème (d’ailleurs, le constructeur ne le préconise pas non plus, il le préconise juste pour les vis de couronne). Mais rien ne vous empêche de le faire. Chacun ses petites manies...

Dernier point : si une âme charitable dispose de l’extrait de doc concernant les ponts montés sur mon tracteur, je suis preneur...

Ces ponts se reconnaissent à la vis de fixation de la bride d’entraînement. Ci-joint photo de la chose.
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J’espère avoir contribué à éclairer quelques lanternes et vous souhaite bonne réflexion! :wink:
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Message non lu par The Pater »

Normand 1400 a écrit : En outre, certains constructeurs (dont Land Rover) donnent plusieurs valeurs : pour roulements neufs ou rôdés. Je ne sais pas ce que la notion de “rôdé” recouvre. Honnêtement, je ne la sens pas bien (50 000 km, 150 000 km?). Je pense que le Pater a les idées plus claires que moi là-dessus.

Il y a des roulements dans des applications il n'y a pas de "rodage", pas de perte de précharge.
Le roulement à rouleaux conique, lui est plus sensible à cause du contact entre les rouleaux et l'épaulement de la bague intérieure.

C'est entre autre pour cette raison (il y en a d'autres) que je n'aime pas les roulements à rouleaux coniques.

Tu remarqueras que sous charge, le rouleau est poussé contre l'épaulement situé sur le coté grand diamètre (en haut du cône). La lubrification de cette surface (obtention d'un bon film lubrifiant) est difficile, et tu as pricipalement du glissement et non du roulage. C'est un peu comme si tu roulais constament avec ton pneu en contact avec la bordure d'un trottoire.

Or à cause de l'angle de contact, une usure de 1 µm au niveau du contact rouleau/épaulement va donner, par exemple (dépend de la référence du roulement) une augmentation du jeu (ou une diminution de la précharge) de 4 µm.

A cause de cette mauvaise lubrification, il y a un écrétage rapide des aspérités, une sorte de rodage. Dès que le "rodage" est fait, "l'usure" diminue et la précharge (ou le jeu) se stabilise.

On augmente la précharge au montage afin d'avoir la précharge adéquate après rodage.

Le "rodage" est très rapide sur un différentiel de véhicule routier, moins de 5000 km et la précharge est stabilisée.




Mais attention :

Les roulements évoluent, les roulementiers travaillent fortement sur le contact face des rouleaux/épaulement dans les roulements à rouleaux coniques.

Donc selon la génération et la marque des roulements, la perte de précharge (le "rodage") va varier énormément.
Un roulement à rouleaux coniques SKF des années 70 ne se comportera pas comme un roulement des années 90 (suffixe Q dans la désignation).

Exemple (pris dans de la vieille doc SKF) pour un différentiel :
Précharge axial de départ entre 4000 et 6000 N (pour un groupe de roulements).
Apès 5000 Km :
Précharge pour roulements SKF ancienne génération : reste 1500 à 1700 N
Précharge pour roulements SKF suffixe Q ( date d''il y a 16 ans quand même) : reste entre 3500 et 4500 N.

Je n'ai pas les valeurs pour les roulements actuels (de SKF), mais la perte par rodage doit être encore plus faible, voir très très faible dans la majorité des applications. En tout cas, on la néglige la plupart du temps....



Donc un document technique de maintenance écrit dans les années 60 ou 70 donnera un réglage ne donnant pas la précharge voulue avec des roulements modernes de grands roulementiers


A+

PS : pour le reste de l'intervention de Normand 1400, j'ai imprimé et lirai tranquille ce we.
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Message non lu par Normand 1400 »

Pater,

:wink:
C'est entre autre pour cette raison (il y en a d'autres) que je n'aime pas les roulements à rouleaux coniques.
J'ai précisément aussi ce type de questionnement. A l'occasion, si tu peux développer ce point, car dans les montages encaissant de gros efforts de flexion, les roulements à rouleaux coniques semblent quand même très performants...

Ton explication, et surtout les ordres de grandeurs que tu donnes (car c'est ça qui me manque) sont très éclairants...

à +
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Message non lu par The Pater »

Normand 1400 a écrit :A l'occasion, si tu peux développer ce point, car dans les montages encaissant de gros efforts de flexion, les roulements à rouleaux coniques semblent quand même très performants...
voir en MP car on sort du context Land Rover.

A+
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Mauresque
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Message non lu par Mauresque »

Au contraire, continuez à débattre roulement ici !!! Je couperais le topic pour en créer un nouveau si besoin...
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